Les technologies de l'information en matière de santé sont stratégiques dans l'amélioration de la qualité des soins prodigués ainsi que la réduction des coûts. Cette appréciation est largement partagée par les acteurs du secteur et pourtant la mise en œuvre à l’échelle internationale, bien que variant d’un pays à un autre, rencontre des obstacles comparables, s’agissant d’un manque d’enthousiasme des praticiens, de compétition entre fournisseurs de solutions ou de protection des données de santé à caractère personnel.

 

Impact de l’e-santé en Europe

Les études concernant dix centres équipés de systèmes e-santé en Europe (Allemagne, Suède, Roumanie, France, République tchèque, Belgique, Danemark, Royaume-Uni …) ont permis de tirer quelques premières conclusions :

  • La e-santé augmente la qualité du travail fourni,

  • La e-santé promet de réduire les coûts, d’améliorer l'efficacité de traitement des patients sans augmenter le besoin en ressources.

Les différences entre les pays

Certains pays sont déjà bien avancés dans la mise en œuvre des DMP (Dossier Médical Personnel) et le déploiement de leurs infrastructures nationales (Danemark, Finlande, Norvège, Suède).
Certains pays se sont engagés à produire des résultats à la fin de la décennie en cours (France – Décret n°2010-1229 du 19 octobre 2010, Canada, Australie, Angleterre, Nouvelle-Zélande et Etats-Unis).
Certains pays mettent en œuvre des politiques d'e-santé (Hong Kong, Singapour, Corée du Sud, Thaïlande et Taiwan).

Les obstacles et les facteurs de réussite de la mise en œuvre d'e-santé

Les études identifient cependant plusieurs obstacles à l’implémentation des technologies de l’information dans le secteur de la santé :

Obstacles financiers

Des preuves solides concernant l'impact économique de la e-santé manquent encore pour convaincre les parties prenantes (ratio coûts-avantages pour chacune des parties – les payeurs, les médecins, les patients)

Obstacles structurels

Ils sont variables d'un pays à l'autre. Aux États-Unis, la plupart des systèmes en complexifient l'exploitation avec les remboursements des soins directs ou indirects et de multiples intervenants. En France et en Belgique, les médecins sont des praticiens indépendants (payés par les patients), ce qui ne facilite pas la mise en œuvre des outils. A contrario, dans les pays scandinaves, où les médecins sont payés par le gouvernement, l’implémentation est évidente. Un autre obstacle structurel majeur est le manque de normalisation et de certification pour les DMP et les outils de la e-santé d’une manière générale.

Barrières culturelles

Le souci de préserver la vie privée des patients ainsi que la confidentialité de leurs propres pratiques restent un frein à l’adoption de ces technologies par les praticiens.

Obstacles techniques et professionnels

Les acheteurs (les praticiens) ne savent pas toujours quels outils préférer; les développeurs de systèmes ne sont pas toujours qualifiés; la main-d'œuvre professionnelle n'est pas toujours capable de diriger la mise en œuvre …

Il n'existe pas de solution miracle qui montre la voie à une mise en œuvre idéale. Toutefois, on peut prendre exemple sur le Maccabi Health Fund en Israël rassemblant plus de 18 années de données et près de 2 millions de membres. Se replaçant dans le contexte des années 90, il a fallu cinq ans pour que le système soit parfaitement opérationnel.

Les enjeux restent alors de fournir une preuve d’un retour sur investissement sans altérer les dynamiques de marché. Il faut également rester vigilant sur le choix des systèmes intégrés qui pourront bénéficier aux praticiens, patients et payeurs, équilibrant respect de la vie privée et une meilleure qualité de soins et réduction des erreurs cliniques.

 

Références

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Middleton, B., Hammond, W. E., Brennan, P. F. and Cooper, G. F. (2005) ‘Accelerating US EHR adoption: how to get there from here. Recommendations based on the 2004 ACMI Retreat’, Journal of the American Medical Association, Vol. 12, No. 1, pp. 13–19.

Miller, R. H. and Sim, I. (2004) ‘Physicians’ use of electronic medical records: Barriers and solutions’, Health Affairs, Vol. 23, No. 2, pp. 116–126.

Shortliffe, E. (2005) ‘Strategic action in health information technology: Why the obvious hastaken so long’, Health Affairs, Vol. 24, No. 5, pp. 1222–1233.

Stroetmann, K. A., Jones, T., Dobrev, A. and Stroetmann, V. N. (2006) ‘eHealth is Worth it? The Economic Benefits of Implemented eHealth Solutions at Ten European Sites’, EHealth IMPACT project study supported by the European Commission Information Society and Media Directorate- General. Luxembourg Office for Official Publications of the European Community.