Coach

Après l’histoire du coaching et sa délimitation théorico-pratique, je poursuis sur ses fondements théoriques et conceptuels.

S’inspirant des concepts des sciences humaines et de la psychanalyse, le coaching puise également certains concepts dans les disciplines telles que : le management, la dynamique d’entreprise, la relation d’aide et la communication. Passons en revue les principales approches théoriques ayant contribué à son développement.

Influence Sociologique

La sociologie s’intéresse aux personnes en interaction avec leur environnement social et culturel. Elle contribue, par ses travaux et par cette étude des comportements humains en groupe, à l’analyse des organisations et plus particulièrement aux théories et structures des organisations. Elle analyse leur culture, identifie les techniques de communication en leur sein, la notion de pouvoir et la gestion des conflits [1]. La connaissance que le coach obtient ainsi de l’entreprise permet de comprendre l’univers du coaché et d’entendre le contenu que lui présente ce dernier. Le coach rentre alors dans la relation d’aide plus aisément. Sans tomber dans le piège d’endosser un rôle de consultant, cette maîtrise de l’univers de l’entreprise permet au coach de ne pas s’enfermer dans le processus.

Influence Psychanalytique

Contrairement à la sociologie, la psychanalyse se centre sur l’individu. Par cette approche psychanalytique, le coach doit effectuer un premier travail sur lui-même afin de révéler les zones d’ombre de sa personnalité et veiller à ce qu’elles n’entravent pas l’entreprise qu’il décide de mener. Le second apport de ce courant est la faculté qu’il donne au coach de discerner si la demande d’aide du coaché relève du domaine du coaching ou de la psychothérapie.

La psychanalyse, créée par Sigmund Freud en en 1896, « désigne une méthode d’investigation des processus mentaux et une technique de traitement des désordres psychiques à partir d’un corpus théorique riche et complexe » [2]Elle offre ainsi au coach des outils d’analyse précieux et ce dernier doit connaître certains éléments de la démarche psychanalytique telle que : « la conscience et utilisation des phénomènes de transfert, le recours à un superviseur pour les phénomènes de contre-transfert. » [3]

Concernant le processus, la psychanalyse observe l’écoute et le silence; le coaching observe l’écoute et le questionnement. « La psychanalyse réconcilie une personne avec son passé mais n’a pas pour but de changer ses comportements » (Délivré, 2004, p.154); le coaching explore la situation qui a créé chez le coaché l’émotion et l’accompagne, dans une restructuration cognitive, à emprunter perceptions et pensées alternatives.

Influence Comportementaliste

« La psychologie comportementale est né à la fin des années 1920 et s’appuie sur la prise en compte des seuls faits observables. […] Le fonctionnement humain peut être décrit et expliqué en s’intéressant uniquement aux stimuli et réponses correspondantes, tous deux observables et mesurables, donc susceptibles de s’exprimer en lois générales. […] Les techniques thérapeutiques dérivées de la théorie comportementaliste […] permettaient de résoudre certaines pathologies. […] Elles pouvaient être traitées en partant de l’idée que ces troubles résultaient d’un conditionnement inadéquat et qu’il suffisait donc de procéder à un déconditionnement et un reconditionnement» [4].

L’apprentissage, engendrant un changement du comportement, présente deux écoles : le conditionnement classique et le conditionnement opérant. L’expérience de Pavlov (1890), apprenant à un chien à saliver au son d’une cloche, démontre que lorsque deux stimuli sont associés – stimuli inconditionné et conditionné – le stimulus inconditionné prend les caractéristiques du stimulus conditionné. Skinner (1904-1990) apportera un concept différent du conditionnement pavlovien : le conditionnement opérant. Un comportement sera conditionné de manière opérante si son occurrence augmente du fait de ses conséquences positives pour l'organisme. Enfin et dans la continuité de l’apprentissage opérant, l’apprentissage social est le processus d’apprentissage par l’observation des autres (parents, éducateurs, pairs, managers, mais aussi acteurs de cinéma…).

Le coach s’inspirera ainsi de ces connaissances pour analyser les réactions du coaché face à un environnement ou des  circonstances données. Il identifiera ainsi quel conditionnement a été opéré sur le coaché. Il poursuivra alors son analyse par l’étude du bien-fondé d’un reconditionnement à opérer sur le coaché.

Influence Cognitiviste

« Afin de répondre aux critiques de réductionnisme […] le cognitivisme naquit au début des années 1960 en remplaçant le modèle stimulus-réponse […] selon un schéma stimulus-traitementréponse» [4]« Beck met l’accent sur la notion de ‘’schémas’’, processus d’encodage et de catégorisation de l’information qui orientent tels des filtres, de façon souvent automatique et potentiellement pathogène, la perception du monde par l’individu» [2] .

Le travail du coach s’inspirant des thérapies cognitives se concentrera sur l’analyse des schémas cognitifs et la recherche des distorsions cognitives. Le questionnement se posera sur les croyances, les prédictions, les interprétations, les jugements de valeurs, les anticipations, les ruminations. Les outils tel que le recadrage, la reformulation dans le but est de changer le système de croyance des individus seront alors utilisés et les pensées alternatives pourront être suscitées afin de contrer pensées automatiques et irrationnelles. Nous sommes ainsi dans un processus de restructuration cognitive.

Influence Humaniste

Nées dans les années 1930, les théories humanistes s’inscrivent en réaction aux « courants psychanalytiques et comportementaliste […] Ces théories reprochent à la psychanalyse de déposséder l’homme de lui-même en en faisant une victime de son inconscient et de pulsions qui le dépassent. […] Elles s’élèvent, par ailleurs, contre la conception comportementaliste […] qui risque […] de réduire l’homme à une sorte de robot. […] L’approche humaniste voit l’humain enquête d’une plus grande réalisation de soi» [2].

Malsow (pyramide des besoins), Rogers (non-directivité), Perls (Gestalt-Thérapie) et Berne (Analyse Transactionnelle) en sont les principaux instigateurs.

Dans un coaching influencé du courant humaniste, l’écoute empathique et la création de l’alliance sont essentielles. Le coach orientera son travail sur l’acceptation inconditionnelle du coaché par lui-même et une plus grande réalisation de soi. Il fera la démonstration d’une confiance inaltérable envers ce dernier et d’une compassion affichée dans le seul but de l’aider à trouver en lui l’énergie nécessaire pour se réaliser et dépasser ses limites.

Influence Systémique

Grégory Bateson (1904-1980) est la figure de référence de l’approche systémique, inspirée de la cybernétique (Norbert Wiener) et de la théorie des jeux (Von Neumann). Théorie de la communication, méthodologies de changement et pratiques thérapeutiques nouvelles en sont les terrains d’investigation.

Vers 1958, Don Jackson fonde le Palo Alto Mental Research Institute qui a pour vocation d’appliquer à la thérapie, les découvertes en sciences de la communication. Virginia Satir et Paul Watzlawick en sont les figures de proue. Les thérapies familiales et les thérapies brèves constituent les champs d’analyse ; la conception nouvelle de la communication, non plus comme schéma linéaire de l’émetteur vers le récepteur mais comme vision globale et systémique des transactions effectuées est étudiée. Une méthodologie du changement qui se focalise moins sur le contenu que sur le contexte et a permis l’élaboration de techniques nouvelles.

L’approche systémique en coaching permet de sortir de l’intra-psychique pour rentrer dans l’interactionnel. Le système, l’écologie du coaché, les types de changement (Changement de type I : Il s’effectue à l’intérieur du système – Changement de type II : On sort du cadre), la notion de double-contrainte (pathologie qui traduit les conflits internes provoqués chez le malade par des injonctions qui se contredisent), la méta-communication (communication à propos de l’échange), le paradoxe (prescription de tâches telles que : faire moins de la même chose, prescrire le symptôme, utiliser la résistance), les niveaux de sens, la métaphore (enrichir la carte mentale du coaché), le recadrage (modification du contexte relationnel, conceptuel ou affectif selon lequel est perçue ou vécue une situation), seront autant d’outils à exploiter par le coach. 

Influence Constructiviste

« L’approche systémique est constructiviste : c’est le sujet qui est l’architecte de sa réalité, et donc maître de son destin » [4]. « Cette réalité est essentiellement définie comme une construction mentale qui guide notre action » [2].

Le coach pourra alors replacer les interactions opérées dans le système du coaché dans un cadre conceptuel plus riche. Le coach doit identifier le processus de construction de la réalité du coaché et lui proposer un recadrage, en accord avec les faits réels, dans le but d’apporter une modification du sens donné à la situation.

 

Extrait de "Apports de l’intelligence émotionnelle sur la motivation d'équipe", Laubie, R. (2008). Mémoire de DESU Pratiques du Coaching, Paris VIII, sous la direction de Michel Moral.

Références


[1] Stephen P. Robbins et Timothy A. Judge, Organizational Behavior, 15 edition (Boston: Prentice Hall, 2012). 

[2] Patrick Amar et Pierre Angel, Le coaching, Édition : 5e édition (Paris: PRESSES UNIVERSITAIRES DE FRANCE – PUF, 2012). 

[3] François Delivré, Le métier de coach : Spécificités, rôles, compétences, Édition : 3e édition (Paris: Eyrolles, 2013).

[4] Michel Moral et Pierre Angel, Coaching : Outils et pratiques, Édition : 2e édition (Paris: Armand Colin, 2009).